Laffrey, France
par Astrid
C'est la première compétition de la saison pour moi et mon binôme lui en a déjà fait énormément.
Réveil 5h, même pas besoin d'attendre la sonnerie tellement mon cerveau m'a réveillé toutes les heures. On se dépêche pour être à l'heure devant la navette qui mène à la ligne de départ. "Combi, chaussettes, chaussures, pullbuoy, plaquettes, bonnet, lunettes, ravito, couverture de survie, chasuble et puce, on a tout ? " (je me rendrais compte plus tard que j’avais oublié mon gobelet réutilisable). J'essaie d'apprécier le moment dans le car, on ressent les émotions de chacun. Chez les LVN c'est plutôt les blagues qui fusent dans le bus. JN me montre certaines portions de natation lorsque que l'on passe devant le lac, la pression commence à monter.
Arrivé au départ, on s'échauffe, on se met en condition, peu d'équipes sont au départ cette année. Deux semaines avant les championnats du monde c'est bien normal. L'organisation met une musique qui monte au fur et à mesure, pour nous motiver. "5, 4, 3, 2, 1" et nous voilà partis ! On essaie de ne pas reproduire la même erreur que sur notre dernière course ; partir trop vite. On part en milieu de peloton et on marque notre rythme. Première natation, on n’a pas le droit de s'encorder. Vu la différence de niveau avec JN, je pars en avance, et il me rattrape dans l'eau. On remarque vite que la course avait plutôt attiré des coureurs cette année, on remonte beaucoup de monde, même sans la longe.
Première sortie, c'est toujours la même histoire, des tournis que j'essaie de combattre pour vite se mettre à courir. C'est la seconde course à pied avec la portion la plus longue de la course : 6,7 km. Seulement avant la fin du premier km, je commence à avoir des crampes au niveau de l'abdomen, au départ ce n'était pas gênant, puis c'est devenu très douloureux, on est obligé de ralentir. Ça grimpe pas mal mais on maintient un petit rythme, moins rapide que prévu mais on s'adapte. Le tracé passe par des sous-bois, mon terrain préféré, je reprends du poil de la bête.
On rejoint deux binômes qui nous avaient devancés et on se rend compte que le dernier balisage datait un peu. Le mal de ventre revient immédiatement et je comprends qu'il est directement lié au stress. On fini par rejoindre le tracé et le lac, mais on a couru un kilomètre de plus, perdu pas mal de temps, et de places. Le moral n’est pas au top mais on se remotive et on se dit qu'il faut savoir aussi profiter de la course.
On retourne à l'eau, et ça fait du bien ! La suite de la course se déroule normalement, mis à part une belle glissade de JN dans l'herbe. Les paysages sont magnifiques, et c'est ça la beauté du Swimrun ; être dans la course tout en profitant de l'environnement. La météo est avec nous, le soleil brille mais il ne fait pas trop chaud, l’eau du lac est bonne. On arrive au ravito de la prairie de la rencontre et on sait que ce qui nous attend ensuite, va nous demander toute l’énergie qui nous reste : 2,5km de natation et le kilomètre vertical avec 1000 m de dénivelé sur 1,8km de distance. Bizarrement entre le 6,7km du départ et le 2,5 km de natation dans l’eau, je n’ai pas vu passer le temps.
On repart, pour ma part difficilement, vers le lac pour la grande natation. Dans l’eau c’est facile pour moi ; je me laisse tracter par JN et je nage comme en piscine. On a d’ailleurs dû s’accorder en début de course car je relevais la tête vers l’avant pour respirer et ça mettait la longe à l’arrêt. Je débranche alors mon cerveau et je laisse JN gérer. Je pense que si on avait pu lire ce qu’il se passait dans mon cerveau à ce moment-là, ça aurait été effrayant. La seule chose à laquelle je pensais c’était « 1,2,3,4 », mon nombre de coups de bras avant de respirer. Il fallait passer une bouée rouge avant de bifurquer à gauche dans le lac. Elle était loin cette bouée rouge ! Ma montre vibre tous les 400 m donc j’essaie de compter mais ça me parait interminable. On arrive finalement sur la plage et au ravito, on a 3 kilomètres avant d’arriver au kilomètre vertical. Mes jambes ne veulent plus, un mois de prépa c’était trop court pour elles. On s’encorde car j’étais à l’aise au niveau cardio, ce qui permet à JN de me tracter et à mes jambes d’avancer plus facilement. On arrive dans le village en bas du Grand Serre et finalement au ravito en bas du Kilomètre vertical. C’est la dernière partie de la course, la plus difficile. Le speaker nous donne notre place : on est 5ème binôme mixte, on peut aller chercher la 4ème place.
JN m’a dit « il y a le Swimrun et il y a le KV ». On avait deux avantages ; il connaissait le parcours et comment le gérer et moi je ne savais pas à quoi m’attendre donc j’avais moins d’appréhension. On commence notre ascension, avec un bon rythme. Le premier panneau apparait : 100 mètres de dénivelé dans les jambes. JN m’encourage beaucoup, mes jambes ne suivent décidément pas ! On arrive dans la partie en forêt, c’est joli, mais ça commence à grimper un peu plus. Sur le chemin, on passe devant le binôme mixte qui nous devançait. 300 mètres de dénivelé, on atteint le ravito.
Le bénévole me tend une pâquerette avec 6 pétales dessus, il me donne la mission de retirer un pétale par 100 mètres de dénivelé. Je lui dis qu’il nous manque encore 100 mètres avant de pouvoir utiliser la fleur, et on repart, avant de se faire rattraper par le binôme juste derrière nous. Je ne sais pas si c’est la fleur, le ravito, ou le fait de se dire que l’on approchait de la ligne d’arrivée mais j’ai eu un regain d’énergie énorme à la moitié du parcours. « Half way » L’ascension commence à être difficile pour JN, je prends le lead (première fois de la course !), et finalement c’est ça la force d’un binôme ; se soutenir toute la course en étant complémentaire. On marche, on crapahute, on grimpe autant avec les mains qu’avec les jambes. J’encourage JN, j’essaie de profiter du paysage incroyable qui s’offre à nous, malgré la difficulté, et surtout j’essaie de maintenir le rythme pour garder un écart avec le binôme qui nous suit.
A partir du panneau des 800 mètres, ça commence à devenir compliqué, je balance des « Aller, aller », ça fini par se transformer en chanson de la fête de la bière. Oui, j’ai chanté sur la fin de la course. Tout moyen était bon pour se distraire ! Le pire à ce moment là c’était plus les premiers qui redescendaient et qui nous disaient « vous avez fait le plus dur », sur le moment, tu les maudis, clairement. On aperçoit la fin, c’est comme si j’avais vu la lumière. Je nous encourage d’autant plus, on voit la ligne d’arrivée, on la passe à deux, enfin on a fini de grimper ! On l’a fait. Je lâche un « p**** c’était dur » avec des yeux humides et JN s’écroule au sol. C’était une sacrée course.